Intendance et spiritualité


01 Déc 2015

Qui suis-je?

Récapitulons quelques notions concernant le concept d’intendance de la création. Si la philosophie rime souvent avec abstrait, il est indispensable qu’elle devienne quelque chose de concret. Ce que l’on perçoit comme étant de la pure abstraction appartient à la raison théorique, mais il y a, soyez rassurés, une branche de la réflexion philosophique plus concrète que l’on appelle la raison ou la philosophie pratique. La spéculation théorique se pose des questions dont les réponses seront limitées aux concepts abstraits, c’est vrai, mais cela doit toujours permettre une réflexion pratique. Ainsi, en philosophant sur la crise écologique, nous avons convenu qu’il est question du rôle d’intendant de l’être humain au centre de la création. Plus précisément, et toujours en restant dans l’abstrait, le problème de l’intendance de la création est un problème identitaire, c’est-à-dire que le problème n’est pas surtout du côté du savoir ou du savoir-faire. Selon nous, le problème est identitaire et du domaine du savoir-être. Face aux problèmes écologiques, les entreprises, les municipalités, les corporations, les gouvernements et les individus doivent se demander : « Qui suis-je? Qui sommes-nous? » C’est ensuite qu’entrent en ligne de compte les questions de savoir et de savoir faire.

L’amour des autres et la nature

Il semble que le savoir-être ne puisse changer par nos propres forces. Comment passer d’une perception de soi à une autre? D’une identité fondamentale à une autre? Cela relève du cœur humain et ne peut être changé que par l’Amour divin qui se partage de façon mystérieuse. Un des messages de l’évangile est celui-ci : Dieu nous aime et veut que nous vivions en harmonie avec Lui, avec les autres, et avec la nature. Avec Dieu, car nous sommes ses biens aimés, créés à son image, avec les autres, car nous sommes tous de la même famille, issus d’un seul Père. Avec la nature, car celle-ci est notre foyer, dont nous dépendons étroitement, dont les autres aussi dépendent, et dont les générations futures aussi auront besoin.

En ce sens, le commandement de l’amour du prochain implique le souci de la nature. Le commandement de l’amour est resté comme imprégné dans l’esprit de l’occident chrétien et on le cite souvent comme une contribution positive (pour certains, la seule…) de la religion chrétienne. Jésus dit : « aimez-vous les uns les autres ». Pas difficile à retenir! Et pourtant, ce n’est qu’une partie de l’injonction. L’amour, c’est trop vague. Qu’est-ce que l’amour, l’amour concret, justement? On le trouve dans le reste de la référence : « Aimez-vous les uns les autres; comme je vous ai aimés, vous aussi, aimez-vous les uns les autres » (Jean 13,34). Voilà qui est plus clair : comme je vous ai aimé. Comment nous a-t-il aimés? En laissant ses propres intérêts et en donnant sa vie pour ses amis, et même ses ennemis. Un autre passage peut nous aider à saisir ce savoir-être d’amour qui nous est commandé : « Que chacun, au lieu de regarder à ce qui lui est propre, s’intéresse plutôt aux autres. Ayez entre vous les dispositions qui sont en Jésus-Christ : lui qui était vraiment divin, il ne s’est pas prévalu d’un rang d’égalité avec Dieu, mais il s’est vidé de lui-même en se faisant vraiment esclave, en devenant semblable aux humains; reconnu à son aspect comme humain, il s’est abaissé lui-même en devenant obéissant jusqu’à la mort – la mort sur la croix » (Philippiens 2,4-8). Ce passage nous dit d’imiter Jésus. Si Lui, qui était en tout supérieur, s’est abaissé pour nous servir, alors à plus forte raison nous, qui ne sommes pas supérieurs à qui que ce soit, devons avoir le souci des autres.

L’importance est capitale pour ce qui est de l’intendance de la création, c’est même là le principe premier. L’être humain est sur la terre pour en être l’intendant au nom de son créateur; or ce créateur est l’humilité même. Il n’asservit personne, ne profite de personne et n’utilise pas son pouvoir pour dominer. C’est là l’identité que nous sommes appelés à revêtir, et nous disons qu’il y a des conséquences pour tout le genre humain, notamment pour le comportement des entreprises et pour la gestion de nos ressources. Comme nous venons de le dire, l’amour du prochain implique la gestion responsable de la nature, car le prochain est quelqu’un, ici ou ailleurs, maintenant ou dans le futur, qui dépend étroitement d’un système écologique équilibré. Mais l’intendance de la création ne s’arrête pas là, il s’agit aussi de gérer nos entreprises comme des ressources au service de la cause de l’amour du prochain et du service de l’autre. Une compagnie d’élagage devrait-elle offrir ses services à un organisme communautaire, gratuitement ou à prix réduit? Devrait-elle utiliser une partie de ses profits pour financer un projet humanitaire? Nous croyons qu’en prenant Jésus en exemple, de nombreuses façons de mettre en pratique l’intendance s’offrent à nous. Ce n’est pas par contrainte, car le commandement de l’amour est exécuté par quelqu’un qui se laisse définir dans son être par cet Amour qui le dépasse.

Un exemple concret d’intendance

Chez Arboplus, nous sommes loin d’être les seuls émondeurs à vouloir faire avancer la cause de l’écologie en arboriculture. L’existence de la Société internationale d’arboriculture du Québec (SIAQ) en est une preuve. Cet organisme fait la promotion du savoir et du savoir-faire arboricole dans le but de favoriser une pratique professionnelle et respectueuse de l’environnement. En faisant référence à leurs publications, les propriétaires peuvent avoir l’heure juste quant aux critères à surveiller pour le choix d’une entreprise d’élagage. Pour ce qui est du savoir-faire, la SIAQ maintient le degré de professionnalisme des entreprises en offrant des certifications aux praticiens. Ceux-ci sont donc tenus de se mettre à jour quant aux pratiques professionnelles et écoresponsables de l’arboriculture. Sur une note plus ludique, la SIAQ organise aussi des championnats d’arboriculture, faisant ainsi la promotion des règles de l’art de l’arboriculture tout en valorisant la compétence et la dextérité requises pour les arboristes grimpeurs. À ce titre, nous recommandons la SIAQ pour tous ceux qui sont à la recherche de moyens et d’informations qui peuvent les aider à agir comme des intendants pour la forêt urbaine, ne serait-ce que pour la gestion d’un seul arbre sur un terrain.

L’intendance d’Arboplus

Quand une entreprise a la conviction d’être appelée par une mission, les initiatives suivent. L’identité de l’intendant, inspirée par la personne de Jésus, si elle est appliquée à toute l’entreprise, fait sortir obligatoirement de l’abstrait pour entrer dans le concret. Chez Arboplus, bien que notre souci premier est de mettre en valeur les arbres, nous avons décidé de soutenir un organisme communautaire qui offre, entre autres, du soutien à la réussite scolaire. Dès le début de la saison 2015, l’équipe d’élagage d’Arboplus est allée chez Entr’ados à Hochelaga-Maisonneuve pour faire l’élagage d’une demi-douzaine d’arbres sur le terrain. Le but de cet élagage était d’harmoniser la présence d’arbres sur le terrain avec le projet de jardin qui allait avoir lieu à l’été 2015 et dans lequel des jeunes de 12 à 15 ans allaient participer. Le tout fut gratuit et comptait, pour nous, comme contribution dont nous croyons que nous sommes appelés à maintenir tant que l’entreprise existera.

Une fois l’espace bien dégagé pour le projet « La gang du jardin Entr’ados », le lieu était prêt pour un apprentissage essentiel et amusant sur la production de nourriture saine et économique pour les jeunes. Le projet nous plut tellement que nous avons décidé de donner 7500 $ pour son développement. Une initiative de microentreprise comme celle-ci est certaine de donner des résultats à long terme dans la vie des jeunes participants. Tout d’abord, il y a l’estime de soi. Le simple fait de se savoir capable de produire de la nourriture est assez pour qu’un jeune soit fier de lui-même. Il y a aussi le savoir-faire du jardin qui, en soi, est un avantage pour qu’une personne ou un groupe puisse obtenir une plus grande autonomie financière tout en consommant des produits sains et biologiques. Le jardinage est aussi, en tant qu’activité, un passe-temps constructif qui encourage le développement mental, plus en tous cas que les jeux vidéo!

Le point fort est selon nous dans le fait que le jardin est une microentreprise. Cela signifie que les jeunes apprennent à gérer une petite production et un petit commerce. En les initiant ainsi au monde du travail, le jardin devient le premier élément que ces jeunes pourront inclure dans leur CV.

L’hiver, un temps de réflexion et de repos

Pour bien des élagueurs, l’hiver est un temps de réflexion et de repos. Or, ce temps devrait aussi privilégier un certain recul sur le travail accompli. Avons-nous contribué aux solutions face à des problèmes tels que l’agrile du frêne? Avons-nous traité chaque arbre avec respect? Avons-nous profité de nos connaissances pour informer chaque client pour les équiper afin de préserver leurs arbres? Les entrepreneurs peuvent aussi réfléchir à des initiatives philanthropiques. Chez Arboplus, l’hiver sera un temps pour réfléchir à notre implication sociale et au rôle d’intendant que notre foi commande pour la pratique de notre métier.

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Dominic Perugino

Comments

  1. Jean-Daniel Veer : décembre 3, 2015 at 11:45 pm

    J’ai vu le livre de Francis Schaeffer, La pollution et la mort de l’homme, dans la librairie de ETEM/IBVIE. Ça m’a aussitôt fait penser à ce petit livre!

  2. Bravo Dominic, c’est une bonne réflexion, et bravo à Arboplus pour son implication sociale dans Entr’ados.

  3. […] la sagesse nous demande de condamner semble être précisément ce qui conduit, tel un principe, la direction de l’intendance humaine d’aujourd’hui. Presque toutes nos interactions avec la nature sont « redevables » […]

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